Un carburant pour avion dérivé d’une vieille huile de cuisson n’est peut-être pas très sexy, mais ce n’est pas le cas. C’est déjà le moyen le plus efficace de rendre l’aviation d’affaires plus écologique. Les ailettes, les formes aérodynamiques, les matériaux composites de l’ère spatiale et l’avionique contribuent tous à réduire l’empreinte carbone des jets privés, mais ce sont des poids plumes face au carburant aviation durable (SAF). Par rapport au kérosène fossile, le SAF, sous sa forme pure et non mélangée, réduit les émissions de CO₂ jusqu’à 80 %, les particules polluantes de 90 % et l’oxyde de soufre.
« Nous transformons les déchets en trésor », déclare Chris Cooper, vice-président de l’aviation renouvelable chez Neste, l’un des nombreux fournisseurs axés sur le marché naissant des biocarburants pour les avions. M. Cooper fait remarquer que les jets privés brûlent chaque année 1,8 milliard de gallons de carburant fossile. « C’est une empreinte profonde et sombre », dit-il.
La vraie beauté de SAF ? Il fonctionne avec tous les moteurs d’avion qui brûlent du carburant Jet A, sans qu’il soit nécessaire de les modifier.
« L’avion ne remarque pas la différence, mais l’environnement, si », déclare Ed Bolen, président et directeur général de la National Business Aviation Association (NBAA). L’association professionnelle a pesé de tout son poids pour que l’industrie adopte la SAF. « Après des années de solutions qui n’ont apporté que de petits pourcentages de gains en matière de durabilité, nous avons trouvé le grand truc », dit-il.
L’année dernière a marqué un tournant. NetJets s’est engagé à utiliser au moins 100 millions de gallons au cours de la prochaine décennie, tandis que Signature Flight Support, de San Francisco, est le premier opérateur de vols fixes au monde à convertir la totalité de son approvisionnement pour l’aviation d’affaires. Elle utilise les oléoducs existants pour acheminer le biocarburant jusqu’à San Francisco, explique M. Cooper.
Des entreprises aussi diverses que Nike, Deloitte et Amazon ont promis de s’engager. Bill Gates, de Microsoft, le plus gros acheteur de SAF du pays, souligne que son coût, trois fois supérieur à celui des combustibles fossiles, reste un obstacle. « Il sera intéressant de voir comment nous pourrons faire évoluer ce système et comment nous pourrons faire baisser la prime verte de 300 % », a-t-il déclaré lors d’une récente conférence.
L’un des moyens, selon les partisans, consiste à offrir des incitations financières. La NBAA, Neste et des dizaines d’autres entreprises aéronautiques soutiennent un crédit d’impôt pour les mélangeurs. Ce crédit vise à aider les producteurs de SAF à construire des bioraffineries, et l’augmentation de l’offre entraînera une baisse des prix des biocarburants. Neste prévoit de produire 515 millions de gallons de SAF en 2023, soit près de 15 fois les niveaux actuels. Selon la NBAA, la production de biocarburants pourrait atteindre un milliard de gallons d’ici 2025.
La rapidité avec laquelle les prix baissent et les infrastructures se développent sont les grandes inconnues. M. Cooper pense que l’adoption des SAF est inévitable car elle est propulsée par les clients en cabine. Des entreprises comme VistaJet indiquent que 80 % de leurs clients ont payé pour compenser la production de carbone de leurs vols. « Nous assistons au plus grand mouvement de l’aviation d’affaires depuis longtemps », déclare M. Cooper, « et c’est le consommateur qui en est le moteur ».
De nombreuses entreprises d’aviation parlent de durabilité, mais aucune n’a fait un effort plus important que NetJets. L’inscription à son programme Blue Skies a plus que doublé au cours des six derniers mois, les propriétaires de NetJets achetant des crédits carbone pour s’assurer que leurs heures de vol sont neutres en carbone. À l’échelle de l’entreprise, NetJets indique que 38 543 tonnes métriques ont été compensées au cours des six derniers mois et que sa flotte a parcouru environ 750 000 miles nautiques avec du carburant aviation durable (SAF), dont les émissions sont nettement inférieures à celles du kérosène traditionnel. Ses opérations européennes ont compensé environ 1,9 million de tonnes métriques depuis qu’elles sont devenues neutres en carbone en 2012.
En février, NetJets s’est engagé à acheter au moins 100 millions de gallons de SAF au cours de la prochaine décennie. Plus important encore, l’entreprise investit dans la construction d’une nouvelle bioraffinerie avec son fournisseur, Waste-Fuel, et prévoit d’en soutenir quatre autres dans un avenir proche. À pleine capacité, sa bioraffinerie convertira 1 million de tonnes de déchets solides en 30 millions de gallons de SAF par an. Ce carburant réduit l’impact sur les décharges locales, diminue la présence de méthanol dans l’atmosphère et, pour les entreprises d’aviation d’affaires, change leur réputation de pollueur en entreprise citoyenne responsable.